L'impartialité du tribunal constitue l'un des éléments majeurs du droit à un procès équitable.
La récusation est l'incident de procédure soulevé par une partie qui suspecte un juge de partialité envers l'un des plaideurs sans contester la compétence d'une juridiction. Tout juge peut être récusé. Ainsi, par exemple, les magistrats du ministère public peuvent également être récusés.
Avant toute procédure de récusation, un juge qui a des liens avec une partie pouvant le rendre impartial peut demander à être remplacé après avoir signalé la situation aux parties et aux membres de la juridiction.
Il est utile de différencier la récusation de la suspicion légitime. Cette dernière est un autre cas de renvoi par lequel une demande de dessaisissement est faite à l'encontre d'une juridiction entière, susceptible de n'être pas indépendante ou impartiale.
Récusation et procédure civile
Le Code de procédure civile précise le régime de la récusation. Celui-ci a été réformé par le décret n°2017-892 du 6 mai 2017.
Les causes de récusation
Les causes de récusation sont illimitées. L'article 341 du Code de procédure civile qui reprend l'article L. 111-6 du Code de l'organisation judiciaire énonce 9 cas.
Ainsi, une récusation peut être demandée si :
- le juge ou son conjoint, ou la personne avec laquelle il est lié par un pacte civil de solidarité, a un intérêt personnel à la contestation ;
- il y a amitié ou inimitié notoire entre le juge et l'une des parties.
Il a été décidé en jurisprudence que les causes énoncées à l'article 341 du Code de procédure civile ne sont pas limitatives. Le Code précise également des causes de récusation tenant à l'impartialité objective ou fonctionnelle.
Exemple : un juge qui a déjà jugé une affaire en 1er ressort ne peut pas juger les mêmes faits.
La procédure de récusation
Le Code de procédure civile prévoit avec précision la procédure de récusation (articles 342 et suivants). La partie qui veut récuser un juge doit, sous peine d'irrecevabilité, le faire dès qu'elle a connaissance de la cause de récusation, et en aucun cas après la clôture des débats.
La demande de récusation doit être formée devant le premier président de la Cour d'appel, par acte remis au greffe de la Cour d'appel. Cet acte doit indiquer les motifs de la récusation et être accompagné des pièces justificatives.
Le magistrat concerné et le président de la juridiction dont il dépend peuvent être invités à faire des observations. Le premier président de la Cour d'appel statue dans le délai de 1 mois par ordonnance (il statue à bref délai si le juge concerné est un juge de la liberté et des détentions).
Si la demande de récusation est admise, il est procédé au remplacement du juge. Le rejet de la demande en récusation entraîne le maintien du magistrat mis en cause ; le demandeur à la récusation est condamné à une amende civile (pouvant aller jusqu'à 10 000 €) et, éventuellement, à des dommages et intérêts.
Le greffier avise les parties de la décision rendue, par tout moyen et sans délai, ainsi que le juge dont la récusation a été demandée et le président de la juridiction à laquelle appartient ce magistrat.
Bon à savoir : l'ordonnance rejetant la demande de récusation n'est susceptible de recours qu'en formant un pourvoi en cassation.
À noter : lors d'une procédure civile en cours, toute personne peut consulter en ligne, depuis le site justice.fr, l'état d'avancement de son dossier, accéder à certains documents, être alertée des mises à jour de l'affaire et recevoir un rappel de convocation par SMS. Il convient pour cela de consentir à la dématérialisation (formulaire à télécharger depuis le portail justice.fr) de son affaire puis de se connecter à son espace personnel.
Procédure pénale et récusation
Comme en matière civile, la récusation est une défense contre le soupçon avéré de partialité de juge. Le Code de procédure pénale précise le régime de la récusation (articles 668 et suivants).
Les causes de récusation
L'article 668 du Code de procédure pénale vise 9 cas de causes de récusation du juge.
Ainsi, un juge peut être récusé si lui ou son conjoint ou son partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou son concubin sont parents ou alliés de l'une des parties ou de son conjoint, de son partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou de son concubin jusqu'au degré de cousin issu de germain inclusivement.
La procédure de récusation
La demande de récusation peut être introduite tant par le ministère public que par les parties au procès. Ainsi, en matière pénale, il peut s'agir :
- de la personne mise en examen ;
- du prévenu ;
- de l'accusé ;
- de toute partie ou de son mandataire muni d'un mandat exprès.
Elle est déposée au greffe de la juridiction à laquelle appartient le magistrat mis en cause et toujours avant le début des plaidoiries, à moins que la cause de la récusation ne soit apparue que postérieurement à cette phase. La demande de récusation est toujours précise et motivée, et doit être accompagnée des pièces propres à la démontrer ou des justifications utiles.
Bon à savoir : en matière pénale, la requête en récusation ne dessaisit pas le magistrat dont la récusation est demandée. En effet, contrairement à ce qui est prévu en matière civile, la demande de récusation ne produit aucun effet automatique sur l’instance pénale. Le procès ou l’instruction se poursuit normalement, sans tenir compte de la procédure en récusation.
La juridiction saisie peut, toutefois, procéder au renvoi de l’affaire afin d’attendre l’issue de la procédure de récusation.
À noter : contrairement à ce qui est prévu en matière civile, le fait que le juge acquiesce à la demande de récusation ne met pas fin à cette procédure en entraînant le remplacement du juge. La procédure se poursuit, son issue dépendant de la seule décision du premier président de la cour d’appel.
Le premier président de la cour d’appel ou de la Cour de cassation statue par une ordonnance qui produit effet de plein droit (article 671 du Code de procédure pénale).
Si la requête en récusation est accueillie, le magistrat récusé doit être remplacé, en application des règles d’empêchement. L’ordonnance qui rejette la demande de récusation prononce, à l’encontre de son auteur, une amende civile de 75 à 750 €. En matière pénale, l'ordonnance statuant sur la récusation n'est susceptible d'aucune voie de recours et produit ses effets de plein droit.
Récusation et procédure administrative
Le Code de justice administrative précise le régime de la récusation par l’article L. 721-1 qui dispose que « la récusation d'un membre de la juridiction est prononcée, à la demande d'une partie, s'il existe une raison sérieuse de mettre en doute son impartialité ».
À noter : la récusation est peu demandée en procédure administrative.
La récusation peut être demandée par une ou plusieurs parties. Elle peut être dirigée contre n'importe lequel des membres de la juridiction. Elle doit, en principe, impérativement et à peine d'irrecevabilité être formée dès l’apparition de la cause ou de la connaissance du motif de la récusation. Elle est présentée par mémoire écrit et signé indiquant les motifs de récusation.
Le président de la juridiction ou de la formation de jugement adresse cette requête au membre de la juridiction concernée par la demande de récusation et recueille son opinion dans les 8 jours.
Toutefois, lorsque la demande apparaît totalement irrecevable, le président ne la transmet pas à l'intéressé et la rejette :
- Si le conseiller (juge) admet la demande de récusation, il est aussitôt remplacé et la procédure reprend son cours.
- S'il nie le bien-fondé de la demande de récusation, la juridiction statue sur cette demande et le fait hors présence du conseiller concerné.
- Si la demande de récusation est rejetée, le juge reprend aussitôt sa place au sein de la juridiction et l'instance se poursuit.
- Si la récusation est admise, le juge est définitivement écarté.
Il est possible d'interjeter appel ou de se pourvoir en cassation contre le jugement ou l'arrêt refusant de récuser un juge. Cet appel ou ce pourvoi ne peut être formé qu'à l'occasion de l'appel ou du pourvoi contre le jugement rendu sur le fond.