Si le droit d'agir en justice afin de défendre ses intérêts est un droit primordial, il trouve sa limite dès lors qu'il devient abusif. Faisons le point sur la notion de procédure abusive.
Fondements de la procédure abusive
Il existe plusieurs fondements textuels de l'abus du droit d'agir en justice.
On les trouve au sein du Code de procédure civile (CPC), classés selon l'état d'avancement de la procédure :
- article 32-1 du CPC : « celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 €, sans préjudice des dommages et intérêts qui seraient réclamés » ;
- article 559 du CPC : « en cas d'appel principal dilatoire ou abusif, l'appelant peut être condamné à une amende civile d'un montant de 10 000 €, sans préjudice des dommages et intérêts qui lui seraient réclamés (...) » ;
- article 628 du CPC : « le demandeur en cassation qui succombe dans son pourvoi ou dont le pourvoi n'est pas admis peut, en cas de recours jugé abusif, être condamné à une amende civile dont le montant ne peut excéder 10 000 € et dans les mêmes limites, au paiement d'une indemnité envers le défendeur ».
Bon à savoir : le principe existe aussi en matière pénale. L'article 177-2 du Code de procédure pénale prévoit la possibilité de condamner la partie civile à une amende maximale de 15 000 € en cas de « constitution de partie civile abusive ou dilatoire ».
À noter : en matière administrative, l'article R. 741-12 du Code de justice administrative prévoit que « le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 10 000 euros ».
Comment faire reconnaître une procédure abusive ?
Il est souvent difficile de démontrer que l'on a été poursuivi à tort et par pure malveillance. Les critères permettant de reconnaître la procédure abusive sont essentiellement jurisprudentiels, compte tenu de la variété des procès.
Ainsi, de manière générale, on retiendra que l'exercice d'une action en justice ne dégénère en abus qu'à la seule condition de démontrer l'acte de « malice » ou de mauvaise foi (Cass. 1re civ., 30 juin 1998).
Exemple : il y a abus et procédure abusive lorsque le demandeur au procès cherche, par son action, à tirer profit d'un gain qu'il sait ne pas être le sien (Cass. chambre mixte, 6 septembre 2002).
On notera aussi que ni un retard de paiement, ni la multiplicité des procédures engagées ne peuvent caractériser un abus de droit (Cass. 3e civ., 2 février 1998 ; Cass. 2e civ., 21 décembre 2006).
En tout état de cause, le juge est tenu de motiver sa décision. Il ne doit pas se contenter de relever le « caractère abusif » de la procédure engagée pour condamner (Cass. soc., 18 mai 2005).
Si en principe l'abus du droit d'agir est commis par le demandeur au procès, il peut aussi être le fait du défendeur (Cass. 1re civ., 5 avril 1954).
Procédure abusive : quelle issue devant le juge ?
L'abus est punissable de 2 manières :
- L'amende civile est la première possibilité laissée au juge pour sanctionner en cas de procédure abusive. Le montant maximum est de 10 000 € en matière civile. Mais cette condamnation est reversée à l'État et non pas à la partie adverse, ce pourquoi celle-ci dispose d'un recours supplémentaire.
- Elle peut formuler une demande de dommages et intérêts en fonction du préjudice subi du fait de la procédure. Tout dépend alors de son argumentation.
Bon à savoir : en l'état, le préjudice subi peut être moral ou financier.
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