Tierce opposition

Sommaire

Audiance au tribunal

La tierce opposition est une voie de recours extraordinaire qui a pour objectif la rétractation ou la réformation d’un jugement, qui, en modifiant la situation juridique d’une des parties, a lésé les intérêts d’un tiers.

La tierce opposition permet à un tiers qui n’était ni partie ni représenté à la procédure et qui critique une décision, de faire à nouveau statuer en fait et en droit.

À noter : on parle de « rétractation » si le second jugement émane du même tribunal que le jugement attaqué, et de « réformation » si le second jugement émane d’un autre tribunal de degré égal ou supérieur.

Conditions de la tierce opposition

La tierce opposition, voie de recours extraordinaire, est prévue aux articles 582 et suivants du Code de procédure civile. Elle n’est admise que dans des situations précises.

Tierce opposition : contre quelles décisions ?

La tierce opposition est ouverte contre toute décision (contentieuse ou gracieuse), quelle que soit la juridiction dont elle provient.

Par exception, elle ne s’applique pas :

  • aux décisions rendues par la Cour de cassation (qui ne portent pas atteinte en elles-mêmes aux droits des tiers) ;
  • lorsque l’action en justice est expressément réservée à certaines personnes (exemple : action en contestation de paternité).

Les titulaires de l’action

La tierce opposition est réservée aux tiers, c’est-à-dire aux personnes qui n’ont pas été parties à la procédure. Le tiers doit pouvoir justifier d’un intérêt à agir.

Ne peuvent pas former tierce opposition :

  • les personnes à qui est ouvert un recours ou un appel ;
  • les personnes représentées (qui ont donc eu un défenseur à l’instance), les créanciers et les autres ayants cause.

Une tierce opposition ne peut être formée :

  • en cas de représentation dans le cadre d’un contrat de mandat ;
  • en cas de représentation d’un incapable par son tuteur légal ;
  • entre époux communs en biens, chacun des époux ayant en sa qualité d’administrateur de la communauté le pouvoir de défendre seul aux actions concernant les biens communs ;
  • en matière gracieuse, pour les jugements susceptibles d’appel, les tiers à qui le jugement a été notifié (pour les jugements rendus en dernier ressort, la tierce opposition est toujours possible) ;
  • en cas de solidarité entre codébiteurs.

Bon à savoir : dans ce dernier cas, par exception, l’action leur est ouverte si le jugement a été rendu en fraude de leurs droits ou si elles invoquent des moyens qui leur sont propres.

Les délais pour former tierce opposition

Concernant la tierce opposition par voie principale, le délai pour agir est de trente ans à compter de la décision,

  • sauf si la loi prévoit un délai plus court ;
  • et sauf si le jugement a été notifié aux tiers opposants, auquel cas le délai est abrégé à deux mois (à condition que la notification indique le délai et les modalités du recours).

Concernant la tierce opposition par voie incidente, il n’y a pas de délai pour former tierce opposition.

Bon à savoir : si l’affaire jugée est en appel ou devant la Cour de cassation, le tiers peut intervenir pour la première fois devant ces juridictions.

Régime de la tierce opposition

La procédure est la même que pour une instance principale devant la juridiction compétente : le tribunal remet l’affaire au rôle, entend à nouveau les parties et rend un nouveau jugement.

La juridiction compétente varie selon que la tierce opposition est formée par voie principale ou par voie incidente.

La tierce opposition par voie principale

La tierce opposition par voie principale concerne une personne qui apprend l’existence de la décision en dehors de toute instance.

Elle est formée comme une demande principale, par voie d’assignation devant la juridiction ayant rendu la décision attaquée. Le jugement peut être rendu par les mêmes juges que ceux ayant rendu la décision initiale.

La tierce opposition est alors une voie de rétractation.

Bon à savoir : la tierce opposition peut porter sur un point dépendant d’une juridiction ayant compétence exclusive. Dans ce cas, la juridiction saisie doit surseoir à statuer.

La tierce opposition par voie incidente

La tierce opposition par voie incidente concerne une personne qui apprend au cours d’une autre instance l’existence d’une décision qui lui porte préjudice.

Elle est formée comme une demande incidente devant le juge saisi de la demande principale.

  • Elle constitue une voie de réformation lorsque la juridiction saisie du litige en cours est de degré supérieur à celle qui a rendu la décision attaquée, ou de degré égal à condition qu’aucune compétence exclusive ne s’y oppose.
  • Elle constitue une voie de rétractation, si la juridiction saisie est d’un degré inférieure à celle qui a rendu la décision attaquée, ou d’un degré égal, la compétence de la juridiction initiale étant exclusive. Dans ce cas, le juge saisi de la demande principale doit renvoyer l’examen de la tierce opposition incidente au juge ayant rendu la décision attaquée.

Tierce opposition : effets

En principe, la tierce opposition n’a pas d’effet suspensif. Cependant, la juridiction peut ordonner la suspension de l’exécution de la décision attaquée si elle est dommageable au tiers opposant (article 579 du Code de procédure civile).

En vertu de l’article 582 du Code de procédure civile, la tierce opposition a un effet dévolutif : elle remet en cause les points jugés qu’elle critique pour qu’il soit à nouveau statué en fait et en droit. La juridiction saisie de la tierce opposition est saisie du premier procès et reprend l’examen au fond de la première affaire en fait et en droit.

Attention : le tribunal ne peut modifier sa décision que sur les chefs de demande qui sont préjudiciables au tiers opposant !

Deux cas de figure sont possibles :

  • La décision est confirmée : elle devient opposable au tiers opposant (qui peut au surplus être condamné à des dommages et intérêts).
  • La décision est rétractée ou réformée : elle devient inopposable au tiers opposant sur les chefs qui lui faisaient griefs, mais elle conserve ses effets entre les parties, même sur les chefs annulés (article 591 du Code de procédure civile).

Le jugement rendu sur tierce opposition est susceptible des mêmes recours que les décisions de la juridiction dont il émane (article 592 du Code de procédure civile).

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