
Un étranger non membre de l'Union européenne, de l'Espace économique européen ou de la Suisse, peut être expulsé s'il menace gravement l'ordre public (article L. 631-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers).
Il ne faut pas confondre l'expulsion pour menace grave à l'ordre public d'un étranger en situation régulière avec la reconduite à la frontière d'un étranger qui séjourne illégalement en France. Nous faisons le point.
Menace grave à l'ordre public entraînant l'expulsion
Le seul fait d'avoir commis une infraction pénale ne suffit pas à rendre l'expulsion légitime (Conseil d'État, 12/2/2014, n° 365644).
Les juridictions administratives ont défini la menace grave à l'ordre public. Pour qu'il y ait menace grave à l'ordre public, il faut que l'étranger ait commis des actes particulièrement lourds (vol à main armée, violences, homicide, viol, trafic de drogue, etc.). La récidive est souvent prise en compte, de même que la multiplication des condamnations.
À titre d'exemples, il y a menace grave à l'ordre public dans les cas suivants :
- condamnation à 13 ans de prison pour viols répétés sur une mineure de 15 ans (Conseil d'État, 7/11/2012, n° 354224) ;
- condamnation à 4 ans de prison pour agression sexuelle en état d'ivresse ; puis condamnation à 6 mois de prison pour recel de biens volés pendant la période de semi-liberté (Conseil d'État, référé, 23/8/2013, n° 371314) ;
- 14 mois de prison, dont 10 mois fermes, pour violences sur son propre enfant et son conjoint, ainsi que menaces de mort répétées ; sursis révoqué pour de nouvelles violences contre l'épouse (Conseil d'État, 20/10/2007, n° 310111).
Étrangers non expulsables pour menace grave à l'ordre public
Certains étrangers ne peuvent pas être expulsés simplement pour menace grave à l'ordre public. Ils ne peuvent légalement être expulsés que s'ils ont commis des faits particuliers.
Sûreté de l'État
Certains étrangers ne peuvent être expulsés que si c'est une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'État ou la sécurité publique (article L. 631-2 et article L. 252-2 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers).
On ne peut les expulser pour menace grave à l'ordre public que s'ils ont été condamnés définitivement à 5 ans au moins de prison ferme :
- étranger père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il ne vive pas en polygamie et qu'il contribue à l'entretien de l'enfant depuis sa naissance ou depuis au moins 1 an ;
- étranger marié depuis au moins 3 ans avec un(e) Français(e), à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé et que le conjoint ait conservé la nationalité française ;
- étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de 10 ans, à condition qu'il n'ait pas séjourné en France pendant toute cette période avec la carte de séjour temporaire étudiante ;
- étranger titulaire d'une rente accident du travail ou maladie professionnelle servie par un organisme français, à condition que le taux d'incapacité permanente soit d'au moins 20 % ;
- ressortissant d'un pays membre de l'Union européenne, ou d'un État membre de l'Espace économique européen, ou de la Suisse, à condition qu'il séjourne régulièrement en France depuis au moins 10 ans : ces ressortissants ne peuvent pas non plus être expulsés pour menace grave à l'ordre public même s'ils ont été condamnés définitivement à 5 ans au moins de prison ferme.
Intérêts fondamentaux de l'État
Certains étrangers ne peuvent être expulsés que si leur comportement :
- est de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de l'État ;
- ou est lié au terrorisme ;
- ou est une provocation explicite et délibérée à la discrimination, à la haine ou à la violence contre une personne déterminée ou un groupe de personnes.
Ces étrangers ne peuvent pas être expulsés pour simple menace grave à l'ordre public même s'ils ont été condamnés définitivement à 5 ans au moins de prison ferme.
Ils sont énumérés limitativement par l'article L. 631-3 nouveau du Code de l'entrée et du séjour des étrangers :
- étranger qui justifie par tous les moyens résider habituellement en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de 13 ans ;
- étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de 20 ans ;
- étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de 10 ans et qui est marié(e) depuis au moins 4 ans soit avec une personne française ayant conservé la nationalité française, soit avec un étranger qui justifie par tous les moyens résider habituellement en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de 13 ans :
- il ne faut qu'il n'y ait ni polygamie, ni que la communauté de vie entre époux ait cessé ;
- l'étranger peut être expulsé pour menace grave à l'ordre public si sa menace vise son conjoint, ou ses enfants, ou les enfants sur lesquels il exerce l'autorité parentale ;
- étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de 10 ans et qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France :
- à condition qu'il n'y ait pas polygamie et que l'étranger contribue effectivement à l'entretien de l'enfant depuis sa naissance ou depuis au moins 1 an ;
- l'étranger peut être expulsé pour menace grave à l'ordre public si sa menace vise son conjoint, ou ses enfants, ou les enfants sur lesquels il exerce l'autorité parentale ;
- étranger qui réside habituellement en France et dont l'état de santé est incompatible avec une expulsion.
Européens ou mineurs : pas d'expulsion possible
Les ressortissants de la Suisse, d'un pays de l'Union européenne ou d'un pays membre de l'Espace économique européen peuvent être expulsés si leur comportement est une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société (article L. 252-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers).
Un étranger de moins de 18 ans ne peut pas être expulsé (article L. 631-4 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers).
Pour approfondir le sujet :
- Pour exercer un recours contre une reconduite à la frontière, inspirez-vous de notre modèle de lettre.
- Consultez aussi notre modèle de lettre pour un recours contre un refus d'entrée en France.
- Le mariage avec un étranger est encadré juridiquement.
- Un divorce peut avoir des conséquences sur le titre de séjour.