Vous êtes le créateur d’une œuvre ou d'une création et souhaitez bénéficier à ce titre de la protection conférée par le droit de la propriété intellectuelle. Cette notion désigne une atteinte à vos droits exclusifs d'exploiter une œuvre dont vous êtes le créateur.
La propriété intellectuelle désigne tout ce qui s'apparente aux créations de l'esprit : un objet, un livre, un dessin, un film, une chanson, une peinture... Elle est protégée par la loi aux moyens de brevets, du droit d'auteur ou des droits d'enregistrement de marques.
Cette fiche vous indique que faire en cas de violation de la propriété intellectuelle.
1. Vérifiez que vous êtes victime d'une violation de vos droits de propriété intellectuelle
Pour pouvoir revendiquer le bénéfice de la protection conférée par le droit de la propriété intellectuelle, et ainsi obtenir la condamnation pénale ou civile de l'auteur de la violation de vos droits de propriété intellectuelle ainsi que le versement de dommages et intérêts pour vous indemniser, vous devez être en mesure d’apporter la preuve que l’œuvre dont vous êtes le créateur bénéficie de la protection des droits moraux et des droits patrimoniaux conférée par le droit de la propriété intellectuelle.
Vous devez :
- démontrer que votre création revêt un caractère original ;
- prouver que vous bénéficiez d’une antériorité dans la création de cette œuvre par rapport aux créations similaires des personnes dont vous entendez démontrer qu’elles violent vos droits de propriété intellectuelle, ce qui est le cas lorsque vous êtes le compositeur d'une œuvre musicale, l'auteur d'un roman ou encore l'inventeur ou le designer d'un objet.
Vous pouvez établir cette preuve en rapportant la preuve d’un dépôt préalable de l’œuvre qui permette d’attribuer une date certaine à celle-ci. En outre, depuis le 1er juillet 2020, il est possible de déposer une demande provisoire de brevet : il s'agit d'une manière simple et peu onéreuse de prendre date en terme d'antériorité, pour protéger des innovations, avant d'initier une demande de dépôt de brevet (prévue aux articles R. 612-3-1 et suivants du Code de la propriété intellectuelle).
À noter : le dépôt préalable auprès de l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) ou encore l’usage comptent au nombre des formalités qui permettent d’apporter la preuve de la date à compter de laquelle un brevet ou une marque ont été créés, par exemple.
Bon à savoir : depuis le 19 novembre 2018, toutes les demandes de dépôt de brevet s'effectuent sous forme électronique sur le site internet de l'INPI via l'interface dédiée. Par ailleurs, le 24 juin 2021, l’INPI a lancé le tout premier MOOC (Massive Open Online Courses) « Comprendre la propriété intellectuelle ». Il est accessible depuis le site inpi.fr. Il s’agit d’un programme pédagogique ludique qui alterne vidéos d’experts, cas pratiques, mini jeux dont l’objectif est d’apporter aux non-initiés les notions essentielles de la propriété intellectuelle (marques, dessins et modèles, droit d’auteur, brevets, lutte contre la contrefaçon, etc.).
Remarque : Legide est un service en ligne de protection des créations soumises au droit d’auteur proposé par la Chambre des huissiers de justice de Paris (CHDJP). Cette plateforme permet de délivrer et de stocker des preuves d’intégrité et d’antériorité d’une œuvre ou d’une innovation pour se prémunir contre les risques de contrefaçon et bénéficier des droits qui résultent du travail des créateurs. La protection est valide en France et dans les 178 autres pays signataires de la Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques. Legide est ouvert à tous les créateurs (indépendants, entreprises, sociétés de gestion de droits d’auteur, etc.) et tous types de supports et œuvres (scripts, plans, croquis, collections, photographies, codes informatiques, designs, partitions de musique, etc.).
2. Contactez un spécialiste et rassemblez les preuves en cas de violation de la propriété intellectuelle
En matière de propriété intellectuelle, le principe qui s'applique est celui de liberté de la preuve ce qui signifie que vous n'êtes pas contraint de rapporter un type de preuve en particulier.
Consultez un conseil en propriété intellectuelle ou un avocat spécialisé afin de solliciter son avis en ce qui concerne l’opportunité d’une action en cas de violation de la propriété intellectuelle. Il vous indiquera la marche à suivre pour rassembler les preuves de la violation de vos droits et les actions à engager.
Si vous disposez de peu de preuves, il est préférable d'adresser une réclamation auprès des services de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes qui dispose de pouvoirs d’enquête et peut rechercher des preuves de l'infraction commise afin de constater les délits en matière de propriété intellectuelle.
Remarque : les éléments de preuve peuvent notamment être des contrefaçons, des catalogues, des documents commerciaux et des factures, ainsi que des preuves informatiques. Il faut en rassembler plusieurs car une seule ne peut vous assurer d'apporter une preuve irréfutable de la violation de vos droits.
3. Saisissez un juge pour vous constituer la preuve d'une contrefaçon
Si vous soupçonner une personne de violer vos droits de propriété intellectuelle par la contrefaçon de vos créations, sollicitez par requête une saisie-contrefaçon afin d’être autorisé à faire saisir des éléments probants qui attestent de la violation de la propriété intellectuelle. Cette requête peut être réalisée par un avocat et vous permet de demander au juge l'autorisation de saisir les preuves de la violation de vos droits intellectuels auprès de celui qui en est l'auteur.
Exemple : si vous êtes le créateur d'un sac à main, vous pouvez demander d'être autorisé par le juge à réaliser la saisie de sacs contrefaits directement auprès du contrefacteur.
Le juge compétent pour les requêtes est le président de la juridiction compétente pour connaître le contentieux concerné. Ce juge rendra une ordonnance dans laquelle figurera une liste des éléments saisissables.
Bon à savoir : si vous demandez une saisie-contrefaçon par requête, votre adversaire ne sera pas informé de votre démarche avant la réalisation de la saisie qui sera effectuée par un huissier de justice.
Remarque : le ministère de la Justice met à la disposition du grand public une carte des juridictions compétentes en matière de contentieux relatifs à la propriété littéraire et artistiques, aux dessins, modèles, marques et indications géographiques.
4. Déposez une plainte auprès de l’une des autorités compétentes pour agir au pénal
Agir au pénal vous permet d’obtenir la condamnation pénale de l’auteur des faits (peine d’amende, d’emprisonnement). Votre choix d’exercer votre action devant les juridictions pénales peut aussi être influencé par les délais de prescription. À compter de la violation dont vous êtes victime, vous disposez, pour agir, de 3 ans.
Bon à savoir : passé ces délais, vous ne pourrez plus saisir le tribunal pénal.
Pour saisir le juge pénal, selon votre choix, vous pouvez soit porter plainte auprès des services de police ou de gendarmerie soit porter plainte directement auprès du procureur de la République.
Portez plainte auprès des services de police ou de gendarmerie
Une fois vos différentes preuves rassemblées, munissez-vous de votre dossier de preuves ainsi que des documents qui attestent que la paternité de l’œuvre litigieuse vous revient et rendez-vous dans un commissariat de police ou de gendarmerie afin de porter plainte pour violation de votre propriété intellectuelle.
Déposez directement une plainte auprès du procureur de la République
Déposez directement une plainte auprès du procureur de la République du tribunal judiciaire du lieu de l'infraction ou du domicile de l'auteur de l'infraction en lui adressant un courrier dans lequel vous mentionnerez différents éléments (adressez votre plainte par courrier recommandé avec accusé de réception afin de vous ménager la preuve de cette démarche) :
- l’identité et les coordonnées de l’auteur de la violation si vous les connaissez ;
- les faits précis et les infractions qui lui sont reprochés ;
- la date et la mention du lieu où ils ont été commis ;
- l’énumération de vos dommages.
Bon à savoir : en matière pénale, vous bénéficiez du principe de liberté de la preuve. Cela vous autorise, par exemple, à produire un enregistrement audio effectué à l'insu de votre adversaire, tandis que cet enregistrement sera rejeté au civil.
Attendez la décision du procureur sur les suites à donner à votre affaire
Une fois la plainte déposée auprès des services de police et de gendarmerie ou envoyée au procureur, cette dernière lui sera transmise. Il lui revient de décider des suites à donner à votre affaire et pourra décider l’une des options suivantes :
- un règlement amiable ;
- une citation directe et saisir directement le tribunal ;
- des poursuites pénales : le procureur de la République saisit le juge d'instruction. ses conclusions détermineront l'opportunité d'un procès ou non ;
- le classement sans suite :
- L'infraction est considérée comme minime, l'auteur des faits n'est pas identifiable ou le procureur de la République estime que la victime se désintéresse de l'affaire.
- Dans ces conditions, la victime conserve la possibilité de saisir la justice pénale, au moyen de la plainte avec constitution de partie civile.
En cas de classement sans suite, vous pouvez encore vous constituer partie civile en déposant une plainte avec constitution de partie civile auprès du doyen des juge d'instruction du tribunal judiciaire. Ce dernier étudiera votre plainte et suivra ou non la décision du procureur de la République. S’il décide également de ne pas poursuivre, vous pourrez faire appel de ladite décision auprès de la chambre d'instruction. S’il décide de poursuivre, une information judiciaire sera ouverte.
Bon à savoir : le juge d'instruction peut vous demander de payer une somme d'argent en garantie d'une éventuelle amende si votre constitution de partie civile était jugée abusive.
Important : ne prenez pas à la légère cette possibilité car si le juge d’instruction suit l'avis du procureur, vous vous exposez à des poursuites pénales notamment pour poursuites calomnieuses.
Conseil : il est idéal de contacter un avocat spécialisé en propriété intellectuelle à cette étape car ce dernier pourra vous guider lors du procès et saura vous aider à rassembler les preuves nécessaires pour mener votre action en justice.
5. Exercez une action au civil
Votre choix d’exercer votre action devant les juridictions civiles peut être influencé par les règles de prescriptions. Vous disposez de 5 ans pour agir devant le juge civil à compter de la violation dont vous êtes victime. Si vous agissez uniquement au civil vous ne serez pas contraint de porter plainte, cependant ayez conscience que seule l'action pénale permet d'obtenir les peines de type amende, emprisonnement.
Assignez l’auteur de la violation de la propriété intellectuelle devant le tribunal judiciaire et, ce, quel que soit le montant de votre litige car il dispose d’une exclusivité de compétence en matière de propriété intellectuelle. Le juge civil vous octroiera des dommages et intérêts.
Prenez un avocat afin de pouvoir intenter cette action.
6. Proposez un mode alternatif de règlement des litiges
Dans le cadre d’une instance en cours devant un tribunal, vous pouvez contacter l’auteur de la violation de vos droits de propriété intellectuelle afin de lui proposer de transiger et de convenir d’une solution amiable afin de régler ce litige.
Remarque : en matière de propriété intellectuelle, le nombre de contentieux est faible car il s’agit d’une matière dans laquelle les différends se résolvent généralement grâce à la négociation ou à une médiation. Vous avez donc de bonnes chances de pouvoir espérer qu’une négociation soit conclue.