
Les règles pénitentiaires européennes sont communes aux 46 États signataires, membres du Conseil de l'Europe. Elles ont été adoptées en 1973 puis révisées en 1987 et dernièrement le 11 janvier 2006.
Établies par le Comité européen de coopération pénologique, elles prennent en compte les règles du Comité européen de la torture et des peines ou traitements inhumains et dégradants (CPT) et la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH).
Elles ont pour objectif d'harmoniser les politiques et les pratiques pénitentiaires, en posant des principes fondamentaux et en donnant des recommandations pratiques (au travers de prescriptions assez détaillées).
Règles pénitentiaires en Europe : description
Les 108 règles pénitentiaires européennes sont regroupées en 8 parties.
Elles concernent les conditions de détention des personnes détenues, et doivent être interprétées différemment en fonction de la spécificité du détenu :
- S'il est condamné, leur finalité est de développer le sens des responsabilités du détenu et non seulement de prévenir la récidive.
- S'il est simple prévenu (en détention provisoire), il ne se verra imposé que les seules règles imposées par la procédure pénale et la sécurité de l'établissement.
Droits fondamentaux
Règle 1: les personnes privées de liberté doivent être traitées dans le respect des droits de l’homme.
Les règles pénitentiaires européennes sont guidées par le respect de la dignité humaine, indispensable à une bonne préparation de la réinsertion du détenu.
Elles doivent être appliquées sans discrimination, avec impartialité, par un personnel pénitentiaire compétent et formé.
Une inspection gouvernementale régulière des prisons, et un contrôle extérieur par une autorité indépendante doivent garantir l'application de ces règles.
Règles d’organisation de la détention
Certaines dispositions comportent les règles minimales à observer concernant l’admission, la répartition dans les locaux de détention, l’hygiène, les relations avec l’extérieur, le travail, les activités physiques et socio-culturelles, l’éducation des détenus.
Les mineurs, les femmes et les ressortissants étrangers font l'objet de règles particulières.
Santé des détenus
Les RPE veulent garantir une surveillance médicale ainsi que l'accès aux soins des personnes détenues.
Règles de vie interne
Les règles de vie internes à la prison doivent garantir l'ordre et la sécurité, tout en respectant la dignité humaine des détenus.
Un équilibre doit être trouvé entre ces deux objectifs, dans la résolution des questions relatives à la sécurité, à la sûreté, aux fouilles, à la discipline et aux sanctions, au recours à la force.
Les requêtes et les plaintes formulées par les détenus doivent être accueillies.
Personnel pénitentiaire
Le personnel de la prison doit agir avec impartialité, humanité et justice auprès des détenus.
Pour cela, il doit avoir une pleine et entière conscience et compréhension du but du système pénitentiaire : une mission de sécurité mais aussi de préparation de la réinsertion.
Conséquences des règles pénitentiaires européennes en droit français
Les règles pénitentiaires européennes n'ont pas de valeur contraignante. Il s'agit d'une référence, d'un objectif à atteindre « dans la mesure du possible ». Elles ont cependant une certaine autorité, puisqu'elles proviennent du Comité des ministres du Conseil de l'Europe, et sont issues de débats intergouvernementaux !
Les RPE sont très suivies en droit français. La loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 a inscrit en droit français la majorité des règles pénitentiaires européennes et on peut citer par exemple :
- le développement des alternatives à l'incarcération ;
- l'amélioration des liens du détenu avec l'extérieur (création des Unités de visite familiale en 2003) ;
- l'accès aux soins et à la santé (loi du 18 janvier 1994) ;
- la construction d'Établissements pénitentiaires pour mineurs à partir de 2006 ;
- le contrôle des prisons par des organismes indépendants (comme le Défenseur des droits) ;
- la réforme du placement à l’isolement du 1er juin 2006 garantit mieux les droits des détenus.
La loi a été intégrée au Code pénitentiaire entré en vigueur le 1er mai 2022.
Règles non reconnues en droit français
Cependant, il reste des règles non-reconnues dans le droit français. On peut citer la règle 50 : « donner la possibilité aux personnes détenues de discuter ensemble de questions relatives à leurs conditions de détention et d’en faire part aux autorités pénitentiaires ». Il n'existe pas de moyen d'expression collective des détenus en France. Ou encore la règle 54.8 : « les personnes détenues doivent pouvoir assister à la fouille de leurs effets personnels », qui s'oppose à l'article D 269 du Code de procédure pénale qui dispose que la fouille se fait en l'absence des détenus.
Règles reconnues difficiles d'application
D'autres règles sont reconnues en droit français, mais difficiles d'application en raison de la vétusté des locaux et de la surpopulation carcérale.
Notamment, les RPE garantissent l’accès à l’information des détenus étrangers, alors qu'en France, les documents mis à disposition des détenus ne sont pas toujours traduits dans une langue qu'ils comprennent.
Ou encore, les règles 18.1 et 18.2 : « les locaux de détention doivent respecter des conditions minimales d’hygiène et de santé » (espace, lumière, aération…). Ces règles se heurtent en France à la vétusté ou à l’ancienneté de certains établissements.